Cette article était publier sur un autre blogue, en 2013. Je le republie ici, sans changement, pour l'instant.
Ca fait quasiment 40 ans depuis que Norman Geisler a publié un article intitulé « A New Look at the Relevance of Thomism for Evangelical Apologetics » dans le journal, Christian Scholar’s Review.[1] Dans cet article Geisler démontre qu’en générale les théologiens évangéliques ont rejeté les œuvres de Thomas d’Aquin, comme étant faux, quand ils sembleraient être d’accords, sans le savoir, avec Thomas d’Aquin sur plusieurs points.[2] Le fait que ces théologiens affirment, d’une seule voix, que Thomas d’Aquin est un faux docteur a eu, dans ce temps, un effet intéressant. Geisler dit, avec un peu de sarcasme, « With the impressive authority of these evangelical ‘Cardinals’ dominating the evangelical scene, there has been an almost universal reluctance among lesser ‘ priests’ and ‘people’ in evangelical circles to say a positive word for the Angelic Doctor. »[3] Geisler continue un peu plus loin en nous expliquant la source du problème, « I must shamefully confess for our evangelical cause that after both a doctorate in Catholic philosophy and nearly twenty years of the direct study of Aquinas it is my conclusion that scarcely an evangelical philosopher or apologist really understands the view of Aquinas, and many of them so grossly distort Thomas that they often criticize him for a view he never held. And with striking irony they often teach, in contrast to what they believe Aquinas held, fundamentally the very view that Thomas held himself. »[4]
Dix
ans plus tard Arvin Vos, un philosophe protestant à écrit un livre intitulé Aquinas,
Calvin, & Contemporary Protestant Thought: A Critique of Protestant Views
on the Thought of Thomas Aquinas. Dans ce livre il prendre la même position que Geisler
avait pris dix ans avant. Il prend le sujet de la relation entre la foi et la
raison, avec les conséquences sur la théologie, ainsi que la doctrine de la
révélation divine et la révélation naturelle, et il démontre que Jean Calvin
est, en générale, en accord avec Thomas d’Aquin. Il y eut quelques différences
de terminologie, et Thomas d’Aquin sonde le sujet beaucoup plus profond que
Calvin, mais ils sont à la base, en commun accord. Il explique que, « many Protestants seem to think
that while there can be no doubt that Aquinas was brilliant, he was
nevertheless fundamentally misguided. For many he serves primarily as an
example of how not to do theology...The verdict is clear: Aquinas may have been
brilliant, but he was fundamentally wrong. »[5]
Vos est d’accord
avec Geisler concernant la raison pour l’attitude Protestante envers Thomas
d’Aquin. Il dit, « The
fundamental problem, I am convinced, is that most Protestants know little or
nothing of Aquinas’s thought, and so they have no way to grasp its relevance
for today. »[6]
Geisler, dans la conclusion de
son article, donne l’antidote pour cette situation embarrassante. « First and foremost is the need for a
first-hand reading of Aquinas. I know of no evangelical critic of Thomistic
theism who is a Thomistic scholar. Most criticism of Aquinas is based either on
stereotyped textbook scholasticism or second-hand evangelical
pseudo-scholarship. If others interpreted the Bible the way we have tried to
understand Aquinas – through second-hand critical distortions – we would justly
cry ‘Unfair! Go back to the originals and understand them in context.’ To this
we add, ‘Go thou and do likewise with the writings of Aquinas.’ »[7]
Est-ce
que l’attitude, ou la raison pour l’attitude, a changé aujourd’hui? Trente ans
après le livre de Vos, et quasiment 40 ans après l’article de Geisler? La
réalité est que cette attitude est toujours vivante. Dans une conférence à
Montréal en 2011, John MacArthur a enseigné aux pasteurs et étudiants et
d’autres membres des églises évangélique au Québec que la théologie Naturelle
est souvent comprise comme étant la tentative humaine de se rendre à Dieu par
l’utilisation de sa capacité de raisonner. Donc, il disait, la théologie
naturelle est offerte comme un autre moyen de salut. Il disait que toutes ces
idées trouvent leurs racines en Thomas d’ Aquin et Aristote.[8] (Dans une autre publication
de blog (ici) j’ai répondus à ces accusations concernant ce que Thomas d’Aquin
enseigne sur la théologie naturelle, et concernant « l’opinion
commune » concernant la théologie naturelle.) Cet opinion n’est pas, par
exemple répandus; l’attitude, dans les cercles évangélique, au moins aux
États-Unis, est plus positive envers Thomas d’Aquin, comme nous pouvons voir
dans un livre intitulé « Beyond the Bounds : Open Theism and the
Undermining of Biblical Christianity », édité par John Piper, Justin
Taylor et Paul Kjoss Helseth.[9] L’attitude générale, dans les
églises évangéliques au Québec, est malheureusement plus inspirée par MacArthur
que par n’importe quel autre auteur. Ce fait, alimenté par une hostilité à tout
ce qui est Catholique, contribue pour créé une attitude plutôt hostile au
« docteur universelle » de l’église Catholique.
Malheureusement, cette
hostilité envers Thomas d’ Aquin n’est pas basée sur une compréhension profonde
de ses écrits. La plupart des critiques de Thomas d’Aquin n’ont jamais lu en
profondeur les écrits de Thomas d’Aquin. Les condamnations sont basées, en
générale, sur des citations pris hors contexte des écrits de Thomas d’ Aquin,
la culture de Thomas d’ Aquin, et sans une compréhension de la terminologie que
Thomas d’ Aquin utilise. On ne devrait pas se baser sur des sources secondaires
pour notre condamnation de d’Aquin, mais, s’il doit être condamné, sur une
lecture approfondie de ses écrits. Tout comme Geisler affirme dans une citation
précédente, si quelqu’un juge la Bible de la même façon qu’on juge Thomas
d’Aquin, on ne serait pas content, et on dirait qu’il devrait lire la Bible
elle-même, et chercher à comprendre le contexte avant de juger.
Un
autre point à noter, avant de continuer, est que même s’il y a des erreurs dans
les écrits d’un auteur, ça ne veut pas dire qu’on doit le rejeter. Les auteurs
chrétiens ne sont pas inspiré de Dieu, ils tentent d’interpréter la parole de
Dieu, et expliquer, de la meilleure façon qu’ils peuvent ce qu’elle enseigne.
Celui qui affirme avoir écrit un livre de théologie, d’apologétique ou un commentaire biblique qui est sans
erreur est un menteur. Donc, on ne rejette pas un auteur simplement parce qu’il
a fait des erreurs, on étudie, avec discernement, et on garde ce qui est vrai,
et rejette ce qui est faux.
On
pourrait se demander; pourquoi étudier Thomas d’Aquin plus qu’un autre?
Qu’est-ce qu’il pourrait apporter au Christianisme, au monde évangélique,
aujourd’hui? Je ne veux pas écrire un livre sur le sujet, mais, j’aimerais
donner quelque piste de réflexions sur ce sujet.
On
vit, présentement, dans une société post-catholique et postmoderne. Quand on
dit post-catholique on veut dire que la population, en générale, ne veut rien
savoir des propos Chrétiens (la Bible, Jésus, l’église), et il y a une attitude
vraiment fermée à la religion. Ça ne veut pas dire que les gens ne sont pas
religieux, mais qu’ils ne veulent rien savoir de ce qui ressemble au
Catholicisme dans lequel le Québec était, pour tellement longtemps, noyé. Quand
on dit postmoderne on fait référence à l’idée qu’il n’y a pas une vérité
objective, et que tout le monde a raison. “Ce qui fonctionne pour une personne
n’est pas nécessairement ce qui va fonctionner pour une autre”. “Ce qui est
vrai pour toi, n’est pas nécessairement vrai pour moi”. Comment rejoindre une
telle société avec l’évangile? L’évangile parle de Jésus, il se trouve dans la
Bible, c’est prêché par l’église, et il se dit la vérité, la seule voie à Dieu.
L’évangile est tout ce que notre société rejette.
L’auteur
des Actes des Apôtres, dans le chapitre 17, nous démontre Paul en train
d’engager deux groupes différents. En Actes 17 :1-4 Paul s’en va dans la
synagogue juif, et il prêche l’évangile aux Juifs. Qu’est-ce qu’il fait? Il ne
commence pas en citant Jean 3 :16. Le texte nous informe qu’il a commencé
dans l’Ancien Testament en les démontrant que leur Messie allait venir pour
mourir, et qu’il allait être ressuscité. Après avoir démontré ces faits à
partir de l’Ancien Testament il déclare que Jésus est ce Messie, qu’il est
l’accomplissement des prophéties, et que le salut se trouve en lui seul. En
Actes 17 :16-34 Paul adresse les païens et les philosophes à Athènes. Il
ne mentionne pas le nom de Jésus. Il commence avec une démonstration que le
Dieu qui a créé le monde, et toute créature, est un, et qu’il va juger le monde
par un homme qu’il a ressuscité de la mort.
Paul,
dans ces deux textes, quand il annonce l’évangile, commence avec l’autorité que
son audience accepte. Avec les juifs, il utilise l’Ancien Testament, et avec
les philosophes Grecs il utilise la raison. Notre société n’accepte pas
l’autorité de la Bible – ni l’Ancien Testament, ni le Nouveau Testament – alors
on commence avec quoi? On fait ce qui a souvent été appelé la
pré-évangélisation.[10] Ça veut dire qu’on répond à
leurs questions. Les questions qu’on se fait demander sont les
suivantes : Dieu existe-il? La Bible est-elle fiable? Jésus est-il
Dieu? Si Dieu existe alors pourquoi
est-ce qu’il y a autant de mal et douleur dans le monde? On se fait confronter
par les affirmations suivantes : Il n’y a pas de vérité objective! Dieu
n’existe pas! La Bible n’est que la parole des hommes utilisés pour contrôler
la société!
Pourquoi Thomas d’Aquin?
Premièrement, on peut s’appuyer sur Thomas d’Aquin pour des arguments cohérents
qui démontre d’une façon philosophique que Dieu existe. Si on connait bien les
arguments de Thomas d’Aquin à ce sujet nous allons être capable de répondre aux
contradicteurs (qui est la job d’un serviteur du seigneur selon Paul en 2 Tim.
2 :25).
Deuxièmement, Thomas d’Aquin
nous donne une doctrine de Dieu qui est bibliquement solide, et qui est
philosophiquement cohérente. Donc, une fois de plus, si on connaît, comme il
faut, Thomas d’Aquin nous allons être capables de répondre aux philosophes
anti-théistes, et aux hérétiques qui veulent enseigner une fausse doctrine de
Dieu.
Troisièmement, tout comme Vos
démontre dans son livre, Thomas d’Aquin, quand on prend le temps de comprendre
ce qu’il enseigne, nous donne une bonne compréhension de la relation entre la
foi et le raison, la théologie et la philosophie, la révélation écrit et la
révélation générale (ou naturelle).
Quatrièmement, Thomas d’Aquin
démontre pourquoi la vérité est objective.
Cinquièmement, il nous aide à
expliquer la doctrine de la trinité et l’incarnation de Jésus. C’est-à-dire, il
nous aide à voir pourquoi il n’est pas contradictoire, malgré le fait qu’on ne
peut pas le prouvé philosophiquement.
Il y a bien d’autres sujets dans lequel une compréhension approfondie des écrits de Thomas d’Aquin peut nous aider. Pourquoi Thomas d’Aquin? Parce qu’il nous aide à faire de la théologie, l’apologétique, l’interprétation de la Bible, et l’évangélisation. Il n’est pas parfait, il est un homme comme les autres, mais, ca vaut la peine de l’étudier. On n’a pas besoin de devenir Catholique pour utilisé les œuvres de Thomas d’Aquin. Il a écrit, environ, 300 ans avant la réformation. Si on prenait le temps d’étudier les œuvres de Thomas d’Aquin, comme on étudie n’importe quel autre livre, on trouverait chez lui beaucoup d’arguments, et enseignements, qui vont approfondir notre appréciation de Dieu, son Fils, sa Parole, et l’univers qu’il a créé. Pour moi, après le peu de temps que j’ai eu à étudier les œuvres de Thomas d’Aquin je suis prêt à affirmer, avec Norman Geisler,[11] « As for myself, I gladly confess that the highest compliment that could be paid to me as a philosopher of the Christian faith is to call me ‘Thomistic.’ »[12]
[1]Norman Geisler, “A New Look at the Relevance of Thomism for Evangelical Apologetics”, in Christian Scholars Review, vol. 4, No. 3 (1975), 189-200.
[2]Geisler donne comme exemple, la doctrine d’analogie concernant la façon qu’on parle à propos de Dieu (p. 193), des idées innées (p. 194), et le fait que la Christianisme est la seule vision du monde qui est rational (p. 194-5). Il cite les auteurs suivant : Gordon Clark, (p. 189), Cornelius Van Til (p. 190), E. J. Carnell (p. 190), Carl Henry (p. 190-1), Francis Schaeffer (p. 191), Os Guinnes (p. 191), Arthur Holmes (p. 191), et Ronald Nash (p. 191).
[3]Geisler, 191-2.
[4]Ibid., 192-3.
[5]Arvin Vos, Aquinas, Calvin, and Contemporary Protestant Thought (Washington D.C.: Christian University Press, 1985), xii.
[6]Ibid., xii-xiii.
[7]Geisler, 200.
[8]Voit aussi son livre pour son definition de la théologie naturelle. : John MacArthur, Hard to Believe Workbook: The High Cost and Infinite Value of Following Jesus (Nashville, TN: Thomas Nelson, 2003), 188-90.
[9]John Piper, Justin Taylor and Paul Kjoss Helseth, eds., Beyond the Bounds: Open Theism and the Undermining of Biblical Christianity (Wheaton, IL: Crossway Books, 2003). On voit, par exemple, Russell Fuller qui corrige l’idée que H. P. Owens avait critiqué Thomas d’Aquine (Russell Fuller, « The Rabbis and the Claims of Openness Advocates, » in Beyond the Bounds, ed. John Piper, Justin Taylor and Paul Kjoss Helseth (Wheaton, IL: Crossway Books, 2003), 30.), ou Michael S. Horton qui accepte et défends la doctrine d’analogie de Thomas d’Aquine, et qui refute plusieurs philosophes protestantes qui l’avait malcompris.( Michael S. Horton, « Hellenistic or Hebrew? Open Theism and Reformed Theological Method, » in Beyond the Bounds, ed. John Piper, Justin Taylor and Paul Kjoss Helseth (Wheaton, IL: Crossway Books, 2003), 209.).
[10]Un autre chose à faire, en même temps, est d’aimer la personne en question.
[11]Et plusieurs d’autres philosophes et théologiens Chrétiens comme Stuart Hackett, Jason Reed, R. C. Sproul, W. David Beck, etc.
[12]Geisler, 192.
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